Reportage, publié le 15.09.2020

Une virée échevelée

avec des Ibis chauves

– SUISSE –

Texte par Frédéric Bacuez et photographies par Jérémy Calvo

Afra l’Ibis chauve (Geronticus eremita), bagué et ‘satellisé’ comme tous ses pairs germains en phase de réintroduction centre-européenne, est passé pile poil à la verticale de notre bonne ville d’Annecy ; dans l’ignorance générale. C’est dommage car l’oiseau est une sacrée rareté, inscrite à la Liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) dans la catégorie ‘En danger’. Pas sauvage pour deux plumes, Afra a été ‘ramassé’ dans un champ au sud de Grenoble (Isère), a séjourné quelques heures dans un centre de sauvetage de la faune avant d’être relâché une fois que ses bons samaritains eurent compris le fil de l’histoire…. européenne… Quant à nous, on n’allait pas se faire survoler le crâne chevelu sans réagir !

233, Enea en train de se toiletter perché sur un pylône de ligne haute tension. Cossonay, Suisse – Septembre 2020

Ibis chauve en bord de mer. Tamri, Maroc – Avril 2018

Nous sommes donc partis à la recherche de trois autres ibis porteurs de balises sur le dos pour un estivage helvète. Les lascars sont issus du projet Waldrapp-EU de réintroduction de l’espèce en Allemagne, à Uberlingen quant à ceux-là. Le 11 septembre donc, nous ne parvenons pas à trouver le premier, qui a reflué un peu au nord avant que nous ne soyons informés via le tracker. Eurêka, les deux autres sont à quelques kilomètres et mon oeil marocain – lire ci-après- a vite fait de les repérer perchés au sommet d’un pylône ; au toilettage, indifférents à notre enthousiasme. Pas de vigilant garde en embuscade comme du coté de Tamri… Clic clac, Enea & Akuma, les garçons à calvitie et breloques (233 et 217) nous permettent de ‘cocher’ l’oiseau patrimonial ailleurs que dans son (ultime) bastion ‘naturel’ du royaume chérifien. Plusieurs projets sont en cours afin que l’espèce, chair jadis très prisée, éradiquée du vieux continent dès le 17e siècle, retrouve quelques basses falaises ; et réintègre un paysage qu’elle n’aurait jamais du quitter : en Espagne, en Autriche, en Allemagne, en Italie. Et normalement à la fin de 2020 en Suisse. Les Ibis chauves ‘européens’ sont migrateurs (de courte distance) et passent l’hiver en Toscane (Italie), essentiellement autour de la lagune d’Orbetello.

Akuma et Enea sur un pylône de ligne haute tension. Cossonay, Suisse – Septembre 2020

Akuma et Enea contemplant le paysage suisse. Cossonay, Suisse – Septembre 2020

Lire aussi :

http://waldrapp.eu/index.php/en/

http://waldrapp.eu/…/Laymanreport_LIFE_Northern_Bald_Ibis.p…

http://www.le-tichodrome.fr/AFRA-l-IBIS-CHAUVE-espece-en-da…

https://www.especes-menacees.fr/…/ibis-chauve-en-danger-ex…/

Et au Maroc, en avril 2018…
« Au sud et au nord d’Agadir, le parc national de Souss-Massa et les environs de Tamri bichonnent les ultimes populations « sauvages » au monde de l’Ibis chauve. Au seuil de l’extinction dans les années 80′ du siècle dernier, l’échassier a évité l’inéluctable grâce à un vaste plan de sauvetage lancé au Maroc en 1994. (…) Au dernier pointage (GREPOM 2017) il y avait ici, entre Tamri et Aglou leur dernier refuge, leur espoir, notre espérance, 589 individus dont 122 couples reproducteurs. Depuis 2013, les effectifs y augmentent régulièrement, aidés par une surveillance des trois sites de nidification et de leur périphérie, discrète, efficace, originale (sic) – nous l’avons éprouvée… Deux nouvelles colonies embryonnaires ont été récemment décelées et laissent augurer d’un décisif regain de l’espèce. (…) l’Ibis chauve demeure l’oiseau le plus menacé du Paléarctique. Le Maroc en héberge toujours à lui seul 95% des effectifs. Longue vie et prospérité aux oiseaux patrimoniaux ! »
 
– In ‘Royaume des oiseaux – sud-ouest du Maroc’, page 16 (extraits), Jérémy Calvo & Frédéric Bacuez, ed. Blurb, 2018
lire le magazine sur le maroc

Ibis chauve. Tamri, Maroc – Avril 2018

Ibis chauve en vol en bord de mer. Tamri, Maroc – Avril 2018